Obéir au doigt et à l’œil, dès l’école !

« […] La sécurité est très souvent vécue dans nos sociétés démocratiques comme une atteinte aux libertés individuelles. Il faut donc faire accepter par la population les technologies utilisées et parmi celles-ci la biométrie, la vidéosurveillance et les contrôles. Plusieurs méthodes devront être développées par les pouvoirs publics et les industriels pour faire accepter la biométrie. Elles devront être accompagnées d’un effort de convivialité par une reconnaissance de la personne et par l’apport de fonctionnalités attrayantes : éducation dès l’école maternelle, les enfants utilisent cette technologie pour rentrer dans l’école, en sortir, déjeuner à la cantine, et les parents ou leurs représentants s’identifieront pour aller chercher les enfants. […] » Livre bleu, propositions des industries électroniques et numériques,
Assises du GIXEL (groupement d’entreprises d’électronique), 2004

17 novembre 2005 - Un groupe d’opposants à la biométrie intervient avec des tracts pour expliquer et dénoncer l’expérimentation de bornes d’identification biométrique (iris de l’œil, traits du visage, contour de la main), qui permettent l’accès à la cantine du lycée de la Vallée de Chevreuse, à Gif-Sur-Yvette dans l’Essonne : un des appareils est cassé (20.000 euros de dégâts selon la gendarmerie locale !) ; jugement et condamnations pour « destruction de bien d’autrui » suivent, un surveillant et certains élèves ayant poursuivis, molestés et livrés les opposants à la police.
26 février 2006 - Une exposition, « Biométrie, le corps identifié » à la Cité des Sciences et de l’Industrie de La Villette à Paris, invite les visiteurs de tous âges à se familiariser avec les appareils de contrôle, de manière ludique et interactive. Le partenariat entre Sagem Morpho (une des plus grosses entreprises d’outils biométriques) qui file les subventions, et la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) qui apporte son concours technique à l’expo, montre clairement les liens d’intérêt entre industriels et pouvoirs publics. Il s’agit de tester le dispositif pour préparer sa généralisation et le fait même d’inviter chacun à « se forger sa propre opinion » (alors que les décisions sont déjà prises) fait partie d’une tactique d’acceptation en douceur des méthodes biométriques.. L’expo est perturbée par une centaine de manifestants qui distribuent un tract refusant la biométrie.
Rentrée 2007 - L’identification biométrique se généralise à l’école pour l’accès aux cantines, comme c’est le cas dans notre région au lycée Pierre de Coubertin et au CES de Font-Romeu (Pyrénées-Orientales), dans les collèges de Frontignan et de Mèze (Hérault), ou au collège Marie Curie de Tournon (Ardèche).
La biométrie, censée nous faciliter la vie (chacun devient son propre moyen de paiement, sa clef d’appartement ou de voiture…), facilite surtout l’action de la police, des juges et des patrons, pour mieux nous ficher, nous contrôler (devant son ordinateur, au supermarché, dans les transports – entre autres pour aller ou passer par les États-unis –, dans les prisons), nous expulser, rentabiliser un peu plus notre productivité au travail. Elle s’attaque cette fois à une population jeune qui ne peut que difficilement s’opposer et pour qui ce fichage n’est qu’un début : il faut que cette génération intègre le fait qu’elle doit accepter d’être contrôlée et formatée, et ce par toutes les technologies possibles et imaginables ! C’est en fait une des formes d’un système scientifique et technologique de contrôle social, propre au capitalisme moderne : vidéosurveillance, fichage ADN, puce RFID (carte Navigo).
Les protestations (distribution d’un tract dans les lycées et quartiers de Valence par la CNT-AIT Valence fin septembre, prise de contacts actuelle avec les jeunes et parents d’élèves du lycée de Font-Romeu, par l’Union locale CNT-AIT de Perpignan) et actes de sabotage (une dizaine d’établissements équipés du dispositif ont été victimes d’incendies d’origine douteuse), restent isolés et sans trop d’écho jusqu’à présent.
Rappelons que lors du dernier congrès de notre confédération, l’ensemble des syndicats a rappelé son opposition claire et radicale à toutes ces technologies qui, sous prétexte de soigner, d’aider les populations en les protégeant, ne visent qu’à limiter les libertés individuelles, qu’à instaurer une société bien encadrée, militarisée.

Contre les dispositifs sécuritaires et leur généralisation, pour défendre notre liberté d’être et d’agir, il nous faut développer une dynamique de résistance et trouver des solutions collectives d’information, d’organisation et de lutte.

Jacquie, syndicat intercorporatif de Montpellier CNT-AIT
(Le Combat syndicaliste CNT-AIT – pages Méditerranée - Rhône-Alpes – août/septembre 2007 n° 212)

d’après : CNT-AIT Valence (octobre 2007), Union locale CNT-AIT de Perpignan (septembre 2007), Syndicat intercorporatif CNT-AIT de l’Essonne (février 2006), Collectif contre la biométrie (janvier 2006), Le Monde Libertaire (janvier 2006).