Ils se fichent de notre gueule et de nos vies
Dimanche
7 novembre, Sébastien Briat, antinucléaire de 22 ans, est mort pour s'opposer
au nucléaire comme Vital Michalon, tué par un tir de grenade le 31 juillet 1977
à Creys-Malville.
Sébastien a été fauché à Avricourt (Meurthe-et-Moselle) par le convoi de déchets radioactifs en provenance de l'usine de retraitement de La Hague et à destination de l'Allemagne, alors qu'il avait renoncé à l'action de blocage. En effet, si les trois guetteurs postés à 15 km en amont d'Avricourt avaient bien vu passer le convoi et l'hélicoptère, les deux stoppeurs à 1,5 km de l'endroit prévu du blocage ont tout de suite vu l'absence de l'hélicoptère (parti se ravitailler en carburant et qui seul peut faire arrêter le train) et ont donc décidé de renoncer à l'action. Ils n'ont donc pas envoyé les fumigènes et les huit bloqueurs, puisque l'action était abandonnée, ont commencé à se dégager. C'était sans compter sur la vitesse du train, alors que la visibilité limitée à 250 mètres aurait dû amener le conducteur à rouler moins vite, et que, par deux fois, ce dimanche matin, le train avait déjà été bloqué : par une manifestation en gare de Nancy, puis, à quelques kilomètres de là, par deux militants enchaînés à la voie à Laneuville-devant-Nancy.
Seulement,
la Cogema et la SNCF n'ont que faire de la santé et de la vie des gens. Leurs
intérêts sont de réaliser le plus grand profit. La SNCF déclare n'être que le
transporteur de ce convoi, pourtant bien particulier (cela rappelle, quand
même, que les prédécesseurs de cette même SNCF collaboraient avec Vichy pour
convoyer ceux qui terminaient dans les chambres à gaz, quand d'autres anonymes,
parfois cheminots, sabotaient les voies pour résister au nazisme). Pour la
Cogema, la sécurité est l'affaire de la SNCF, des CRS et du haut fonctionnaire
défense à Bercy. Ce dernier déclare « ne donner que l'autorisation de transport
sans se soucier de la vitesse du train, et veiller à ce que les conditions de
protection des matières nucléaires soient remplies » !
Rappel
des transports de déchets allemands
En
janvier 99, le ministre Vert de l'environnement décide d'interdire à partir du
1er janvier 2001 tout transport de combustible irradié des centrales
nucléaires allemandes pour contraindre les exploitants à fermer celles-ci le
plus rapidement possible. En février 99, sous la pression de la France
(gouvernement Jospin avec Voynet, ministre Vert de l'environnement), le
chancelier allemand change de position. En mars 2001, le ministre Vert allemand
appelle les manifestants à ne pas bloquer les convois et achève de se
déconsidérer chez les antinucléaires qui sont persuadés que seuls les coûts sur
ces déplacements sont susceptibles de faire reculer les industriels du
nucléaire. Si les sabotages du premier convoi du 26 mars 2001 n'ont pas atteint
le niveau de ceux de 97, l'important dispositif policier et matériel coûtera à
l'État allemand 110 millions de marks. De quoi faire bouger une population
majoritairement hostile au nucléaire.
Luttes
de spécialistes ou action directe
Avec la mort de Sébastien, on attend à nouveau la rengaine des éternels soumis, pour qui la lutte antinucléaire doit être laissée aux élus et aux partis politiques, et pour qui les actions doivent être réalisées par des professionnels, évitant ainsi tout accident ou débordement. C'est oublier bien vite que les promesses du PS de ne pas construire de centrales contre l'avis des populations n'ont pas été tenues dès son arrivée au pouvoir en 81, que le décret d'enfouissement des déchets à vie longue dans les laboratoires souterrains a été signé par la ministre Verts Voynet, etc. Quant aux actions de spécialistes à la Greenpeace ou quasi institutionnelles comme celles de la Confédération Paysanne, elles présentent aussi des risques judiciaires et physiques quand elles dépassent les « limites autorisées » et ne suffisent plus à canaliser le mécontentement.
Le
nucléaire, civil ou militaire, fait peser sur l'humanité une menace permanente.
Le nucléaire tue en fonctionnement normal. Le nucléaire justifie tous les
discours sécuritaires. Le nucléaire ne peut être autogéré.
Non
aux transports de déchets nucléaires. Arrêt immédiat du nucléaire.
Michel W., syndicat intercorporatif d'Amiens
(Le Combat syndicaliste CNT-AIT – pages confédérales – novembre/décembre 2004 n° 196)