Le poulailler, ou petit élevage, représente encore au même titre que le jardin, non seulement un moyen de subsistance mais aussi une qualité nutritionnelle et un gage de santé. Ce restant d’autonomie alimentaire que représente le poulailler et qui a permis en d’autres temps à bien des ouvriers de tenir le coup dans une grève, est sérieusement menacé par les mesures imposées contre l’épidémie de grippe aviaire H5N1.
En effet l’obligation de confinement des volailles pour, soi-disant, empêcher la propagation du virus, revient à imposer aux petits élevages les conditions de l’élevage industriel confiné. En pratique c’est empêcher l’existence même de ces petits élevages et y interdire la qualité et l’autonomie qui les caractérisent. Pourtant, en plus de leurs qualités gustatives et nutritionnelles, dont les œufs et la viande, les élevages familiaux ont en plus l’énorme atout, souvent occulté, de ne comporter aucun antibiotique. Ces antibiotiques sont employés dans l’alimentation industrielle non seulement en prévention de maladies de toutes sortes, mais surtout pour accélérer le développement des poussins comme des volailles. Comme celles-ci ne vivront rarement plus de quelques mois, c’est également une question de rentabilité. Si les hormones ont été interdites, les antibiotiques ne le sont pas. C’est ce qui explique que nous absorbons la majeure partie de ces antibiotiques non sous forme de médicaments, mais principalement par l’intermédiaire de la viande industrielle. Comme si le problème de résistance des virus aux antibiotiques n’était pas aujourd’hui préoccupant.
Le poulailler, même dans des conditions rudimentaires, est un gage de qualité alimentaire en comparaison avec l’élevage industriel. D’autant plus si l’on se soucie des conditions d’existence des volailles qui sont en général bien meilleures et beaucoup moins porteuses de maladies. En effet les fortes concentrations d’animaux au mètre carré, la sélection et par là même une réduction de la diversité génétique conduisent à des milieux forcément beaucoup plus pathogènes. Aussi la responsabilité de l’industrie n’est plus à démontrer dans ce registre avec l’apparition, la propagation, la mutation de certains virus et ceci dans tous les types d’élevage. Et il n’y a pas de raison que ce soit différent dans l’industrie avicole. C’est en tout cas ce que démontre le travail d’information d’une ONG, GRAIN, intitulé : « Qui est le dindon de la farce ? Le rôle central de l’industrie de la volaille dans la crise de la grippe aviaire »
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Le rapport entier, « Qui est le din- don de la farce ? Le rôle central de l'industrie avicole dans la crise de la grippe aviaire », est dispo- nible sur le site http://www.grain. org/briefings/?id=195 (voir lien en bas de page)
. Ce travail d’information nous semble riche et intéressant à connaître même s’il est plutôt citoyenniste. Comme il est beaucoup trop long pour une diffusion intégrale (19 pages), nous vous proposons le communiqué de presse qui résume assez bien leur travail et à la fin duquel vous trouverez leur site internet. Les personnes intéressées pourront y télécharger le texte entier. Toutefois si vous n’avez pas la possibilité de le faire, nous vous le ferons parvenir gratuitement par voie postale sur simple demande à notre syndicat : CNT AIT / BP 46 / 91103 Corbeil cedex.
Si cette crise de grippe aviaire, par les mesures sanitaires qui sont imposées, sonne le glas des petits élevages à plus ou moins long terme, elle peut se relier et aider à cerner pleinement les « valeurs » de ce système industriel. Dans ce domaine comme dans d’autres, il faut que la population se soumette aux diktats technocratiques. Nous ne rencontrons que peu de protestations à l’encontre du tout sécuritaire, qu’il soit d’ailleurs social ou sanitaire. Ce tout sécuritaire qui, séparé du reste, donne cette apparence humanitaire à l’état alors que celui-ci est le maître d’œuvre et le collaborateur privilégié de tous les désastres. Il n’en reste pas moins que la machine à convaincre, de gré ou de force, est bien huilée avec des problèmes de plus en plus complexes. Toute opposition qui voudrait s’attaquer au système industriel doit s’attendre à faire face à une véritable religion de la science et des experts. C’est une intelligentsia mise au service des armées et de bien d’autres services de contrôle qui offre à l’état toute sa nécessité et sa légitimité à nous confiner et à nous déposséder de tout ce qui peut nous rester d’autonomie ! C’est pour cela qu’il n’y a pas, d’après nous, d’autonomie ou d’alternative possible dans ce système industriel.