Au-delà de cette limite,
votre billet n’est plus valable ou voyage au bout de la nuit

Ça fait une drôle d'impression ces syndicats réunis pour un même appel ! Il y a là, dans le même bateau, la chèvre et le chou, l'âne, la carotte et le bâton et même le bon, la brute et le truand. Peut-être y a-t-il un capitaine dans ce grand rendez-vous consensuel ? Commémorons tous ensemble notre déchéance et retournons demain au chagrin.
Il y a longtemps qu'ils nous ont dit : « votez pour nous, nous nous occuperons du reste ». Alors, ils ont peut-être réussi avec leurs petits pouvoirs institutionnels à encadrer totalement toute velléité de révolte spontanée. Et pourtant, la SNCF malgré ses cloisonnements et ses familles de métiers différents a généré réellement des conflits forts, voire unitaires.
Maintenant, la grande illusion qu'il n'y ait d'autre option que le libéralisme a petit à petit envahi l'entreprise, comme l'ensemble de la société, et le syndicalisme sert l'accomplissement de ce destin.
l'heure actuelle, après la partition RFF-SNCF, après la mise en place d'entités autonomes, le morcellement se poursuit et les privatisations pointent leur nez, ainsi que les atteintes au statut. Le frêt est exsangue, les régions en ont assez de payer et attendent la libre concurrence, les restructurations s'accélèrent.
Les cheminots se résignent et cette résignation est une acceptation de fait des orientations prises tant dans l'entreprise que dans la société en général.
Un mouvement social qui ne mobilise que les seuls cheminots reste corporatiste, s'il mobilise l'ensemble de la fonction publique il est catégoriel, et s'il implique tous les travailleurs, chômeurs, précaires ou retraités, sans remettre en cause cette société capitaliste, il n'est que l'accompagnement de cet ordre social.
la SNCF Madame Idrac a ironisé sur le côté archaïque des syndicats. Cette attitude est bien dans la ligne du libéralisme qui a le même discours pour le syndicalisme dans son ensemble. Serait-ce une exception française ? Alors, tout ne serait pas encore perdu. Le syndicalisme pourrait redevenir l'indispensable outil de changement social qu'il était au début du vingtième siècle.
Le capitalisme impose pour sa survie le développement des transports de marchandises et de personnes. Le TGV s'est imposé en France pour répondre aux besoins des « turbo-cadres » avec comme pendant la fermeture des lignes traditionnelles devenues « non rentables ». L'avion, dont le kérosène est détaxé, envahit l'industrie du tourisme à grand renfort de publicité et de prix hors concurrence. Les contraintes sur les populations sont de plus en plus importantes, imposant des distances entre domicile et travail de plus en plus grandes. Les marchandises se baladent autour du monde en transconteneurs, en avions cargos... On veut relancer les voies fluviales à grand gabarit, percer un tunnel de 52 km sous les Alpes pour relier Lyon à Turin, créer un corridor frêt Méditerranée-Baltique, etc.
Se battre pour de meilleures conditions de travail et de services, c'est bien, mais ignorer l'organisation sociale qui permet leurs dégradations c'est s'exposer à des déconvenues certaines.
Notre but est bien de lier les préoccupations cheminotes à celles de l'ensemble de cette société en s'interrogeant sur ce qui est nécessaire et utile. Nous pensons que c'est le rôle véritable du syndicalisme, visant à un changement social radical. Cela passe par la critique du travail, de la marchandise et exclut tout corporatisme. Ne pas voir le saccage de la planète à cause d'une activité économique de plus en plus éloignée de nos préoccupations, c'est perdre toute possibilité de construction d'une vie libre et autonome.

Tract distribué par la région Nord de la CNT-AIT lors de la manifestation du 8 février à Paris
(Le Combat syndicaliste CNT-AIT – pages confédérales – février/mars 2007 n° 209) Imprimer