Des vérités qui dérangent

à l’occasion de leurs voeux et en prévision des élections sans doute, le 26 janvier dernier les Verts de Corbeil avaient organisé une projection-débat du film de Al Gore et Charles Berling Une vérité qui dérange. Outre que nous ayons eu droit à une messe électorale habituelle, un expert des Verts en questions climatiques était là pour monopoliser le « débat » et répondre à toutes les questions rentrant dans sa grille de lecture. Persuadés que nous ne pourrions exprimer entièrement un point de vue tellement différent, nous nous sommes contentés d’observer et de faire notre critique par écrit.
La messe était dite déjà quand la centaine de personnes présentes, qui doit correspondre à l’électorat des Verts sur tout le canton, se mit à applaudir à la fin du film dont la bande-annonce affirmait sans rire : « C’est le premier film catastrophe dont les responsables et les victimes sont dans la salle. Ce film lève les derniers doutes : les dangers climatiques globaux mettent l’humanité au pied du mur ». Et pourtant, quelle tromperie ce film malgré des vérités qu’il voudrait poser ! Duperie pour plusieurs raisons. Sur la forme déjà, car c’est tout simplement une propagande électorale à la gloire d’Al Gore. Et sur le fond, ce politicien clairvoyant joue sur le sentimentalisme et le catastrophisme pour se donner une belle image de citoyen soucieux de son environnement (qu’il est peut-être), mais qui n’hésite pas à vous déballer à plus soif et sans aucune critique son usage intensif de l’avion, ordinateur et autre matériel polluant. Que nenni des responsabilités et dégâts des systèmes industriels capitalistes ou communistes ! Pour ce visionnaire, toute la faute revient au citoyen lambda, c’est-à-dire vous et moi. En bref, ce film fait partie de ce vaste chantier de culpabilisation des individus pour disculper l’industrie et le capitalisme de leurs logiques destructrices et mortifères.
C’est ce même travail de loobying qui a été utilisé par le GIEC (Groupement International d’experts d’Étude et Recherche sur le Climat) qui, sous la houlette de Chirac, a dévoilé dernièrement au monde entier ses préoccupations sur l’avenir climatique. Présenté comme indépendant, comme peut l’être un doigt dans une main, ce GIEC réparti en sous-groupes est chargé par l’ONU depuis 1988 de publier des rapports sur l’évolution et l’état climatique, ainsi que sur les causes et solutions. Il en était sorti deux entre-temps et c’est le dernier rapport du premier groupe de scientifiques sur sa découverte de l’eau chaude qui vient évidemment de sortir. Ce sont bien sûr tous des experts et scientifiques et ils étaient les seuls à pouvoir l’affirmer, mais il fallait attendre que les conditions politiques leur permissent de l’ouvrir. Et on doit être dans un sacré merdier pour qu’on leur offre une audience pareille, car dans ce milieu c’est rarement la révolte. On est démocrate et on crache rarement dans la gamelle qui nourrit. Leur rapport ce sont des demi-vérités comme celles d’Al Gore ou de Hulot si elles sont séparées des causes. N’empêche que cinquante ans en arrière la communauté scientifique réfutait cette idée de dérèglement climatique, dont le dernier des ploucs devinait déjà les effets. Mais voilà, il fallait des évidences, et pas de n’importe quel aveugle.
Quant aux solutions que ces fameux experts préconisent, ils vont dans la droite ligne du scientisme. Par exemple, ce serait l’énergie nucléaire pour combattre l’effet de serre. Alors que le nucléaire participe à l’effet de serre, c’est comme préconiser une emplâtre à une jambe de bois, des solutions qui n’en sont pas, des solutions qui s’avèreront désastreuses. On peut dire que cette communauté chiante-ifique joue pleinement son rôle de nouvelle religion ou idéologie moderne pour nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Enfin, ce petit détour pour vous dire qu’en ce moment avec leurs élections proches, ils mettent le paquet tous ces politicards avec leurs alliés pour nous culpabiliser et nous responsabiliser des choix passés et à venir. Leur emploi du terme citoyen est d’ailleurs de plus en plus nauséabond, non pas tant pour la pseudo-république démocratique dont il serait le sujet eet qui n’a jamais fait illusion, que pour tout ce que ce concept dorénavant implique d’acceptation, de soumission, de mensonges et de tromperies. Ce terme illusoire de citoyen est entré dans la « novlangue » au service de la domination durable.
Ainsi, il faudrait être citoyen pour trier nos poubelles remplies des emballages industriels qu’on nous a collés de force, il faudrait encore citoyenner en nettoyant aussi les plages souillées pour des industries et un système de merde, enfin pour être un bon couillon il ne faudrait plus prendre sa bagnole pour aller bosser dans leur zones industrielles pourries. En fait, on nous fait subir des logiques capitalistes et industrielles et c’est seulement nous qui pourrions les régler par un changement de nos pratiques quotidiennes. C’est un peu simplet de raisonner ainsi, car chacun sait et se rend compte que ce système nous force à des choix technologiques, sociaux et politiques, qu’il en a les moyens et dans le même temps, il nous dépossède de nos moyens et de nos espaces d’autonomie.
La bonne volonté requise envers la population est encore un trompe-l’œil. Car évidemment que les États ne comptent pas sur la bonne volonté qu’ils savent bien inefficace et irréalisable pour la plupart, mais sur la culpabilisation et les mesures autoritaires inévitables que l’on imposera ensuite pour réduire les dégâts de « l’activité humaine ». Ce qui est prévisible et se précise, c’est l’évolution arbitraire et totalitaire de ce système à tendance écologique. Un éco-totalitarisme en quelque sorte qui se répercutera évidement surtout sur les plus démunis, au service du bien-être d’une minorité mais sous le prétexte de la survie de l’ensemble. L’État et l’armée tiendront pleinement leur rôle de contrôleur social pour le bien « de tous » et mettre hors d’état de nuire les terroristes que seront les individus qui oseront s’opposer à des mesures si nécessaires. En attendant, les écolos dont les Verts dans ce bourbier servent d’accompagnateur dans ce « jeu démocratique de dupes », où la contestation est sans cesse récupérée et utilisée pour que ce bourbier soit durable.
Quelle merde ! Alors si vous avez une idée de comment s’en sortir autrement que par la tartufferie des élections ou des religions, surtout écrivez-nous car ça nous intéresse, ces vérités qui dérangent vraiment.

Syndicat intercorporatif de l’Essonne
(Le Combat syndicaliste CNT-AIT – pages confédérales – avril/mai 2007 n° 210) Imprimer