Communiqué de la région Aquitaine de la CNT-AIT
sur la répression au Pays-Basque

« Celui qui veut sauvegarder sa liberté devra protéger de l’arbitraire même ses ennemis, sans quoi serait établi un précédent qui se retournerait également contre lui ».
Tom Paine, Les droits de l’Homme

Si elle constate les divergences idéologiques majeures qui existent entre elle et le mouvement abertzale, la région Aquitaine de la CNT-AIT ne peut rester muette devant la répression qui touche ce dernier et qui procure à l’État espagnol un arsenal répressif sans précédent, susceptible de s’étendre à toutes celles et ceux qui s’opposent à lui. Elle dénonce également la contagion qui touche aujourd’hui la France et plus particulièrement le Pays-Basque.
Depuis le 11 septembre et les attentats de Madrid, la lutte anti-terroriste est devenue une excuse au nom de laquelle les États développent une politique répressive qui bafoue leurs propres principes juridiques. L’État espagnol semble le plus avancé dans cette voie en Europe. Le procès 18/98 * Lors du procès 18/98, 47 personnes ont été condamnées à des peines de prison allant de 2 années à 24 années de prison pour avoir participé à des activités professionnelles et/ou associatives considérées comme « favorisant » l’ETA, soit 520 années de prison au total des peines pour 4,5 millions euros d’amendes. , qui a rendu sa sentence en décembre 2007, en est la manifestation la plus grave et la plus importante. Des personnes ont été condamnées sans preuve d’appartenance à l’ETA, parce que l’État considère que leur action favorise l’ETA. Ces personnes n’ont pas été condamnées pour ce qu’elles auraient fait, mais pour ce qu’elles pensent. On reproche à certaines d’entre elles, non pas d’avoir collaboré à l’ETA, mais d’avoir prôné la désobéissance civile.
Ceux qui dénoncent les agissements du Tribunal d’exception que constitue la « Audiencia Nacional » sont inquiétés voire arrêtés. Par ailleurs, alors que la torture est un problème récurrent et qui se développe en Espagne, ceux qui la dénoncent sont assimilés à des soutiens de l’ETA et certains ont été arrêtés.
La région Aquitaine de la CNT-AIT s’inquiète et condamne les dérives répressives qui se développent aujourd’hui en Espagne contre le mouvement abertzale. Elle tient à rappeler à chacun que laisser l’État se doter de telles armes est dangereux pour tous les individus et pas seulement ceux qui en sont aujourd’hui victimes. Il ne s’agit pas d’un problème basque mais d’un problème tout court. Par ailleurs, elle constate que, avec l’arrestation des 6 militants anti-OGM d’ELB et les gardes à vue arbitraire d’un militant abertzale non-violent et d’un journaliste palois, l’État français semble s’orienter dans la même voie que le gouvernement espagnol. Le nouvel arsenal juridique de la loi Perben, les procès en comparution immédiate, ont déjà montré, durant les émeutes en banlieues, les manifestations anti-Sarkozy et anti-LRU, les moyens dont s’est doté l’État pour développer la répression.
Dans ce contexte, la région Aquitaine de la CNT-AIT appelle à la solidarité contre la répression et à la vigilance de chacun pour faire respecter les libertés individuelles, acquises de longues luttes et menacées aujourd’hui en Europe.

CNT-AIT Aquitaine
(Le Combat syndicaliste CNT-AIT – pages confédérales – mars/avril 2008 n° 215) Imprimer

* Lors du procès 18/98, 47 personnes ont été condamnées à des peines de prison allant de 2 années à 24 années de prison pour avoir participé à des activités professionnelles et/ou associatives considérées comme « favorisant » l’ETA, soit 520 années de prison au total des peines pour 4,5 millions euros d’amendes.

« Quelques réactions suite au procès :
« Nous nous attendions à un procès sans preuve, mais nous avons eu un procès sans délit. », Poell et Geldoff, deux avocats allemands présents comme observateurs. « Nous verrons bientôt que les policiers dicteront directement la sentence », Gil Matamala, ex-président de l’Association des juristes européens. « Nous sommes en train de perdre, sans savoir quand on pourra les récupérer, ce qui de toute façon sera difficile, des valeurs, des droits communs à tout être humain qui se sont frayés leur chemin avec beaucoup d’efforts pour être inscrits dans la charte de l’ONU », Gijs de Vries, coordinateur de la politique anti-terroriste de l’Union Européenne.
A propos de la torture, Amnesty International déclare pour 2007 : « Les actes de tortures et de mauvais traitements commis par les agents de police en Espagne ne sont pas des faits isolés. Il est possible que cela ne soit pas une pratique habituelle mais, malgré les engagements pris par l’Espagne en vertu du droit international, aucun frein n’est mis en pratique [...]. Le Gouvernement Zapatero fait également la sourde oreille aux recommandations d’organismes internationaux tels que l’ONU, pour l’éradication de la torture. » »