Politiques européennes migratoires contre libre circulation

« L’européanisation » récente des politiques des migrations et de l’asile a commencé à partir du Sommet de Tempere (1999) jusqu’au Programme de la Haye (2004) pour aboutir entre autres à une directive dite « Retour » ou plutôt « directive de la honte ». Elle a notamment permis la montée en puissance de la Direction Générale « Justice, Liberté, Sécurité », des focalisations sécuritaires et anti-migratoires et des politiques de restriction des libertés et droits fondamentaux. Au passage, on remarquera la mise en place petit à petit d’un supra-État européen même si les États nations gardent encore leurs prérogatives. En effet, prenons l’exemple du traité de Schengen qui institue la libre circulation des citoyens des États membres dans l’espace Schengen, nous avons pu constater dans les faits que nous ne pouvons exercer notre droit de contestation et de manifestation (G8 Italie 2001, G8 Nice 2000, etc.).Toutes ces dernières évolutions se sont faites sur une politique de la peur (attentats terroristes, chômage, peur de l’étranger, etc.) et une xénophobie d’État où migration est associé à criminalité.

Quelques repères historiques…

1975 création du groupe TREVI en marge des traités (réunions informelles des ministres de l’Intérieur)
1985 signature de l’accord de Schengen (Allemagne, France, Benelux) dans lequel trois articles sont consacrés à l’immigration (visas, asile, immigration illégale) mise en place du groupe ad hoc immigration qui doit réfléchir à l’abolition des frontières intérieures dans la perspective du marché unique
1990 accord de Schengen II (traité de mise en œuvre) et signature de la Convention de Dublin pour déterminer le pays responsable de l’examen de la demande d’asile
1993 entrée en vigueur du traité de Maastricht qui crée un « troisième pilier » Justice et Affaires intérieures et institutionnalise dans le cadre de l’Union la coopération en matière d’immigration et d’asile
1997 signature du traité d’Amsterdam qui « communautarise » les politiques d’immigration et d’asile, intègre l’acquis Schengen au droit de l’Union européenne et oblige les pays candidats à s’y conformer
1999 Au sommet européen de Tampere, la création d’un espace de liberté de sécurité et de justice est à l’ordre du jour et les dirigeants européens font la mise en place d’une politique d’immigration et d’asile la priorité de l’intégration européenne
2002 Un nouveau sommet européen cette fois-ci à Séville est dédié à la lutte contre l’immigration clandestine

Immigration « choisie » et politique utilitariste

Il est aussi important de préciser que les gouvernements des pays du Sud notamment le Gabon, le Congo Brazzaville, le Bénin, le Sénégal, la Tunisie jouent le jeu de cette politique utilitariste de l’immigration en signant des accords avec l’UE. Ces accords peu clairs instaurent une criminalisation des personnes voulant migrer de leur pays ou de celles en situation irrégulière d’avoir transité par celui-ci. L’Algérie par exemple, envisage ce projet prochainement. Les gouvernements des pays de l’Union Européenne veulent s’affranchir de ce sale boulot qu’ils ont du mal à cacher alors n’est-il pas plus « politiquement correct » de le faire appliquer aux pays d’origine (la Françafrique est toujours au goût du jour) ! ?
Le président français et son gouvernement, actuellement en pleine chasse-aux-sans-papiers, repoussent les limites de l’inacceptable en lançant un projet « d’immigration choisie » visant à dépouiller les pays en voie de développement de leurs « intellectuels et scientifiques » en favorisant l’immigration de ces personnes vers la France.

Depuis juin 2008, la directive retour permet:
- Un enfermement des étrangers pouvant atteindre 1 an et demi, pour le seul fait d'avoir franchi des frontières.
- Cet emprisonnement sera décidé arbitrairement par l'administration sans aucun jugement et sans possibilité de se défendre.
- La détention et l'éloignement des personnes vulnérables et des mineurs qu'ils soient ou non accompagnés, au mépris du respect de l'intérêt supérieur de l'enfant.
- Plus grave encore, le texte permet la détention et l'expulsion forcée des mineurs isolés vers un pays tiers (autre que le pays d'origine) où ils n'ont ni famille ni tuteur légal.
- Une systématisation de l'interdiction du territoire de l'UE pendant 5 ans pour les personnes expulsées, ce qui revient à les exclure et à les criminaliser.
- Le renvoi des étrangers vers un pays de transit diffèrent de leur pays d'origine.

En temps de misère, il y a ceux qui profitent...

La question des sans-papiers n’attire pas que la police.
Elle attire aussi les politiciens (gauche, droite, démocrates chrétiens), les syndicats avides de pouvoir. Tous cherchent à récupérer ces luttes pour agrandir leurs rangs et les orienter vers les urnes ou vers les églises. Les syndicats ne sont pas internationalistes, ils « luttent » contre les expulsions et syndiquent pourtant des forces de l’ordre qui exécutent ces mêmes expulsions ou gardent les centres de rétentions administratifs (véritables prisons pour migrants). Les partis ne font rien pour abolir les frontières, la Croix-Rouge et le Secours populaire collaborent avec les états sous des prétextes humanitaires alors qu’ils sont un rouage de la machine répressive. La solidarité n’a rien à voir avec la charité, elle a une différence essentielle. Elle est d’égale à égale, d’humain à humain, de prolétaire à prolétaire.

Stoppons la répression Solidarité internationale !

Tract CNT-AIT distribué à Vichy,
Syndicat intercorporatif de l’Isère.
(Le Combat syndicaliste CNT-AIT – pages confédérales – novembre/décembre 2008 n° 218) Imprimer