25 ans après sa mort, Reiser reste d’actualité, ce qui prouve bien que le système n’a pas changé de nature et que les problèmes restent les mêmes. Bien sûr, le contexte à quelque peu évolué, quoique... Peut-on parler, par exemple, de crise du capitalisme ? L’affirmation est largement partagée, mais rien ne dit que le système va s’écrouler. Il a déjà prouvé qu’il était capable de se « ressourcer » sur notre dos, grâce à la guerre notamment. Aujourd’hui, le discours alarmiste des dirigeants des pays du « G20 » sert à justifier une intervention des États qui se résume à ceci : utiliser l’argent public pour effacer l’ardoise des spéculateurs. Il n’est pas moins certain que les conséquences sociales de la situation économique actuelle sont désastreuses et risquent de s’amplifier. La redistribution des cartes entre patrons, les plus forts rachetant les entreprises en difficulté ou tuant leurs concurrents, aura des conséquences nouvelles sur nos vies. Mais la perception de la réalité risque, elle aussi, de changer : difficile aujourd’hui de parler d’un système infaillible; difficile également de prôner des « réformes nécessaires » pour réduire les dépenses publiques de quelques millions lorsque l’on débloque en un seul jour des milliards; difficile de soutenir que la faim dans le monde est une fatalité sans tomber le masque, et clairement se désigner comme un homme d’une autre priorité, celle du « tout pour les riches ».
Si la situation doit permettre aux anarchosyndicalistes de développer leur discours, elle peut tout aussi bien profiter à d’autres. Les chimères de « l’intervention nécessaire de l’État » et le « face à l’urgence, il faut faire des sacrifices » peuvent entretenir la confusion et favoriser un renforcement de l’État. Depuis quelques années déjà, les dirigeants peaufinent un arsenal juridique favorisant la répression. Dans cette logique, la campagne anti-immigrée du gouvernement joue un rôle important. Elle a pour objectif de rallier l’électorat d’extrême droite au gouvernement, confortant ainsi un État répressif. Elle banalise par ailleurs des méthodes expéditives et outrancières sur une minorité, que le gouvernement aura tout loisir à étendre si elles passent dans les mœurs. La criminalisation du groupe autonome de Tarnac nous montre également la volonté du gouvernement à préparer la répression contre toutes celles et ceux qui pourraient gêner les « partenaires sociaux » sur leurs plates bandes, lors des prochains conflits.
Parallèlement, et alors que les média la font passer à la trappe, l’intervention française en Afghanistan se renforce et tout porte à croire que la France va accentuer sa politique impérialiste dans les années qui viennent. Et c’est un lieu commun que de dire que les situations de guerre permettent le renforcement du pouvoir exécutif et des tendances autoritaires.
C’est dans cette logique que le dernier congrès de la CNT-AIT, réuni à Pau le 8 et 9 novembre dernier, a décidé de mettre en place deux campagnes nationales dans l’année qui arrive : la première contre la politique anti-immigrée du gouvernement, la seconde antimilitariste. Ces deux thèmes comportent des similitudes, ils résultent d’une même notion que nous contestons, la frontière, et participent au renforcement des forces répressives de l’État. Alors que les conflits sociaux semblent reprendre de la vigueur, dénoncer le renforcement de l’État est une nécessité absolue.
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